Dans le cadre de sa visite officielle en Allemagne, le Premier ministre Nikol Pashinyan a visité à Berlin la Société allemande pour les relations extérieures.

Le vice-président de la Société, l’ambassadeur Rolf Nickel, a remercié le Premier ministre d’avoir accepté l’invitation et s’est dit convaincu que la rencontre d’aujourd’hui permettra de mieux connaître les points de vue et appréciations du Premier ministre arménien concernant les processus régionaux. La rencontre s’est déroulée en présence de politologues, d’experts, de diplomates et d’étudiants.

Le Premier ministre Pashinyan a prononcé un discours, dans lequel il a notamment déclaré :

«Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,

C’est un grand honneur pour moi de revenir, deux ans plus tard, à la Société allemande pour les relations extérieures. Je tiens à exprimer ma sincère gratitude pour m’avoir accueilli ici une seconde fois.

Si nous comparons le thème de nos discussions- "Les perspectives de l’Arménie concernant l’institutionnalisation de la paix, la connectivité régionale et ses relations avec l’UE", avec celui de notre précédente rencontre, "Sécurité et stabilité dans le Caucase du Sud", cela reflète les évolutions historiques et les perspectives futures dans notre région, le Caucase du Sud.

Aujourd’hui, je peux affirmer avec certitude que la paix a été établie entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan le 8 août à Washington, lorsque le Président de l’Azerbaïdjan et moi-même avons signé une déclaration commune, en présence du Président des États-Unis, Donald Trump.

Selon cette déclaration, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont souligné la nécessité d’élaborer une voie vers un avenir prometteur, non conditionnée par les conflits passés, et conforme à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration d’Alma-Ata de 1991.

Nous nous sommes engagés à ouvrir la voie pour mettre un terme à l’hostilité entre nos deux pays. Nous rejetons fermement toute tentative de revanche, aujourd’hui comme à l’avenir.

Le texte convenu de l’"Accord sur l’établissement de la paix et des relations interétatiques entre la République d’Arménie et la République d’Azerbaïdjan" a été paraphé par les ministres des Affaires étrangères des deux pays, en présence du Président Trump, du Président Aliev et de moi-même.

L’un des progrès essentiels réalisés à Washington concerne l’accord visant l’ouverture des communications entre les deux pays pour les transports internes, bilatéraux et internationaux, fondé sur le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de la juridiction des États. Ces efforts devront inclure un lien ininterrompu entre la partie principale de la République d’Azerbaïdjan et la République autonome du Nakhitchevan à travers le territoire de la République d’Arménie, apportant des bénéfices mutuels pour les communications internationales et internes de la République d’Arménie.

Nous menons actuellement, avec nos partenaires américains, des négociations intensives concernant les conditions générales de mise en œuvre du projet de connectivité "Trump International Peace and Prosperity Route" (TRIPP Route).

La société "TRIPP Company", une coentreprise arméno-américaine, sera enregistrée en Arménie et recevra les droits nécessaires pour développer les infrastructures ferroviaires, routières, les oléoducs, gazoducs et câbles à fibre optique. Dès l’année prochaine, nous passerons à la phase concrète d’exécution et de construction.

La mise en œuvre de ce projet, qui correspond pleinement à l’initiative gouvernementale arménienne "Carrrefour de la Paix", créera dans la région des liens et des interdépendances supplémentaires, devenant ainsi un facteur important de paix.

Ainsi, le projet TRIPP Route, ainsi que l’ouverture des communications entre l’Arménie et la Turquie, possèdent un potentiel complet pour devenir une composante essentielle du Corridor central, assurant une connectivité ininterrompue entre l’Europe, le Caucase du Sud et l’Asie centrale.

Mesdames et Messieurs,

Je souhaite également vous informer que l’accord politique concernant l’ouverture progressive des communications entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est déjà en train de se concrétiser.

En octobre, le président Aliev a annoncé que l’Azerbaïdjan supprimait les restrictions sur le transit des marchandises vers l’Arménie à travers son territoire. Il s’agit d’un développement très significatif et positif. Ce qui semblait impossible il y a seulement quelques mois est désormais réalité : du Kazakhstan vers l’Arménie, des céréales ont été transportées par chemin de fer à travers les territoires de l’Azerbaïdjan et de la Géorgie. De notre côté, comme nous l’avons publiquement déclaré, l’Arménie est prête, tant sur le plan politique que technique, à faciliter le transit des marchandises entre la Turquie et l’Azerbaïdjan à travers son territoire.

Compte tenu de cela, je suis convaincu que grâce à une attention quotidienne portée à la paix établie, au respect de l’esprit de la déclaration de Washington et au refus de propos perturbateurs, les gouvernements arménien et azerbaïdjanais pourront institutionnaliser une paix durable entre les deux pays.

Bien entendu, en parlant de notre région, je dois également informer ce respecté auditoire de la situation existante entre l’Arménie et la Turquie.

Depuis notre précédente rencontre à la Société allemande pour les relations extérieures, nous avons été témoins de l’intensification des contacts entre l’Arménie et la Turquie. Ces contacts se déroulent à presque tous les niveaux : entre moi et le président Erdogan, entre nos ministres des Affaires étrangères et représentants spéciaux, entre les ministères des Affaires étrangères des deux pays, ainsi que les ministères sectoriels compétents.

En pratique, nous menons des négociations et maintenons des relations très actives avec Ankara, même en l’absence de relations diplomatiques de jure. Et j’espère que la Turquie prendra la décision politique tant attendue d’ouvrir la frontière avec l’Arménie et d’établir des relations diplomatiques.

La normalisation des relations Arménie-Turquie, la paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, le projet TRIPP Route, les relations amicales entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan avec la Géorgie et l’Iran, ainsi que le dialogue constructif avec la Russie, peuvent faire du Caucase du Sud l’un des corridors de transit les plus attractifs, en conjonction avec les routes Nord-Sud et Est-Ouest. Nous travaillons avec énergie pour réaliser cette opportunité historique.

Chers collègues,

En mars de cette année, le Parlement arménien a adopté la loi sur le « Démarrage du processus d’adhésion de l’Arménie à l’Union européenne ». Beaucoup se demandent quand l’Arménie deviendra membre de l’UE et dans quelle mesure cet objectif est réaliste. La loi sur le lancement du processus d’adhésion à l’UE constitue avant tout pour nous un moteur pour mettre en œuvre des réformes démocratiques cohérentes. Notre objectif est de répondre aux critères de l’UE sur le plan institutionnel et substantiel, car sans cette conformité, l’adhésion à l’UE est impossible.

Lorsque l’Arménie répondra objectivement à ces critères européens, deux chemins s’offriront à nous: soit nous serons acceptés en tant qu’État membre de l’UE, soit non. Bien sûr, notre scénario préféré est le premier. Même si l’adhésion n’a pas lieu, nous aurons atteint une étape importante : l’Arménie sera un pays répondant aux standards modernes les plus avancés.

Notre aspiration à nous conformer aux standards de l’Union européenne découle d’un choix démocratique, et non de considérations géopolitiques. Depuis la Révolution pacifique et non violente de velours en 2018, l’Arménie s’engage, en tant qu’objectif stratégique, envers la démocratie, l’État de droit, les droits de l’homme et un système judiciaire indépendant.

Sur cette voie, il y a seulement une semaine, l’Arménie et l’Union européenne ont adopté « l’Agenda stratégique pour le partenariat Arménie-UE », qui complète l’Accord de partenariat global et élargi (CEPA) existant. Il définit nos objectifs à court et long terme pour notre coopération, devenant une feuille de route unique pour une intégration plus profonde et un alignement renforcé de l’Arménie.

Nous explorons actuellement les possibilités d’intégration sectorielle dans les domaines du numérique, des télécommunications, de l’énergie et des infrastructures.

Mesdames et Messieurs,

Nous attachons une attention particulière à la composante économique de ma visite en Allemagne, en profitant de l’occasion pour renforcer le dialogue entre les communautés d’affaires arménienne et allemande. Pour soutenir ces échanges, notre gouvernement doit faciliter la mobilité de nos entrepreneurs. À ce titre, je suis heureux d’annoncer que nous avons lancé avec succès le dialogue sur la libéralisation du régime des visas avec l’Union européenne. Il s’agit d’une étape importante pour améliorer la mobilité, renforcer les échanges interpersonnels et développer les liens interculturels. Nous avons récemment reçu le programme d’action pour la libéralisation des visas, qui définit les critères et obligations principaux du gouvernement arménien. Si sa mise en œuvre est réussie, un régime de libéralisation des visas sera établi, favorisant des échanges actifs entre l’Arménie et l’Union européenne.

Chers collègues,
Dans ce discours d’ouverture, il est difficile de traiter pleinement le sujet des relations Arménie-UE, car elles sont aujourd’hui véritablement globales et couvrent presque tous les domaines possibles.

Je suis convaincu que le 8ᵉ sommet de la Communauté politique européenne et le sommet Arménie-UE, qui se tiendront en mai prochain à Erevan, offriront une nouvelle opportunité pour évaluer les progrès de nos relations et fixer des objectifs plus ambitieux pour les années à venir.

Permettez-moi de conclure mon intervention en soulignant également l’importance de renforcer nos relations avec les États membres de l’UE, ce qui ouvre des opportunités supplémentaires pour apprendre et coopérer sur une base bilatérale.

Bien sûr, avec d’autres partenaires partageant les mêmes idées, l’Allemagne joue un rôle central pour l’Arménie, et l’adoption de notre agenda stratégique élève nos relations à un nouveau niveau, créant de nouvelles conditions pour notre partenariat stratégique.

Merci.»

Ensuite, le Premier ministre a participé à une table ronde intitulée: « La vision de l’Arménie pour l’institutionnalisation de la paix, la connectivité régionale et l’intégration à l’UE .